Cette vignette se penche sur l’évolution de la criminalité en général et du traitement judiciaire entre les années 1885 et 1915 à la prison désuète de Winter qui desservait le district judiciaire de Saint-François. Il faut ainsi se pencher sur la question suivante : que révèlent les registres d’écrou de la prison Winter sur l’évolution pénale dans le district de Saint-François entre ces années ?
La prison Winter en 1951 [1] | La prison Winter en 2017 [2]
Le graphique ci-contre montre bien l’évolution du nombre d’entrées selon les années dans les registres d’écrou. Ainsi, il est possible de constater l’augmentation définitive du nombre d’entrées entre 1895 et 1915.
Entre 1885 et 1915, une tendance plutôt stable se dessine pour les catégories d’infractions. La plupart des infractions se retrouvent dans deux catégories majeures, soit celles des crimes contre l’ordre public et des crimes contre la propriété. Ces dernières demeurent dominantes durant l’entièreté de la période étudiée, bien que la catégorie des crimes contre l’ordre public devienne majoritaire après 1905. Le nombre de crimes dans la catégorie de l’ordre public peut hypothétiquement être dû à l’augmentation démographique qui s’est produite entre 1885 et 1915. La population passe de 10 985 personnes en 1885, dans le district de Saint-François, à 22 424 en 1915. Considérant le fait que la seconde révolution industrielle s’installe au même moment, la population de travailleurs sans grande éducation est également plus importante, expliquant possiblement l’augmentation de ces crimes, malgré le manque de preuves[3].
Bien que la sentence d’emprisonnement soit dominante, on peut observer une tendance à la diversification des peines au fil du temps. Pour des raisons qui demeurent inconnues, on peut voir une différence notable entre la fin des années 1880 et 1890, période où l’emprisonnement domine avec une moyenne quasi inchangée de 85%, et le début des années 1900. Il y a une chute de près de 10% dans la sentence d’emprisonnement entre 1895 et 1915. L’apparition de nouvelles sentences comme la détention provisoire, les libérations sous caution et sous conditions peut expliquer la diminution des emprisonnements. Il est aussi intéressant de noter qu’en 1915, 7 individus sont relâchés, alors qu’il n’y a pas d’autres relâchements répertoriés dans la base de données. Cela peut porter à croire qu’un manque d’espace dans la prison serait en cause, l’année 1915 étant marquée d’une hausse d’achalandage considérable comparativement aux autres années.
Texte réalisé par : Alexane Roy, Jérôme Parenteau, Jonathan Tardif et Victor Théberge
Patri-Arch, Répertoire du patrimoine culturel du Québec, « Prison Winter. Vue d’angle » (2017), Lien.
Anne Catherine Bélanger-Catta, et Dhyana Robert, « Population de Sherbrooke et ses arrondissements 1818-2013 », Groupe Sherbrooke, histoire et patrimoine, Université de Sherbrooke, 2013, Lien.
Fyson, Donald, “The Judicial Prosecution of Crime in the Longue Durée. Québec, 1712-1965”, dans Jean-Marie Fecteau et Janice Harvey, dir., La régulation sociale entre l’acteur et l’institution. Pour une problématique historique de l’interaction, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2005, p. 85-119.
Gagnon, François, La population carcérale de l’établissement de détention de Sherbrooke, 1891-1931, mémoire de maîtrise (histoire), Université de Sherbrooke, 2001, 119 p.Lien.